Sauvetage de reine au collège sagebien

   L'APIRIUM de la classe ULIS de Sagebien: une expérience alarmante.


   Lorsque cette colonie a fait sa rentrée avec les élèves en septembre, elle comptait de nombreuses abeilles et du couvain, une reine en pleine forme et déjà... des réserves en berne. En effet, dans notre région le "trou de miellée" (comprenez une "période sans fleurs") commence en août et se termine quelque part en septembre, date variable selon les années. Il est parfois nécessaire de nourrir ses abeilles à ce moment de l'année, afin que soient constituées  les abeilles d'hiver, ces abeilles sans lesquelles la colonie ne peut faire le lien entre l'été et le printemps...
   Il faut comprendre que les abeilles ont besoin d'un apport massif de fleurs pour que la reine ponde continuellement et que des réserves de qualité soient constituées, les quelques floraisons ici ou là n'améliorant pas encore cette situation. Et si les abeilles rentrent bredouilles ou ne rentrent pas car atteintes entre temps par un produit chimique quelconque, la reine ne pondra pas ou pondra peu. En outre, les réserves ne seront pas complétées, voire entièrement constituées comme ça aurait dû être le cas pour cette ruche.
   Si vous ajoutez au manque de fleurs la quantité phénoménale d'herbicides pulvérisée partout en cette période, il est aisé de saisir la problématique... Pour cette petite colonie installée dans l'Apirium de la classe ULIS, il y a eu impossibilité de faire des réserves suffisantes, impossibilité de constituer cette armée d'abeilles d'hiver nécessaire, en définitive impossibilité de survivre seule...
   Vraisemblablement, les observations presque journalières nous le confirment, cette mort annoncée est l’œuvre de plusieurs facteurs que le quidam ne peut appréhender facilement en raison de sa complexité insoupçonnée:
*Manque de fleurs à une période cruciale, ou fleurs inadaptées (ex: tilleuls argentés toxiques pour les abeilles...);
*Traitements herbicides quand les colonies ont peu de choix dans les floraisons (fin d'été et automne);
*Automne très doux qui a amené la consommation excessive du peu de provisions effectuées;
*Couvain tardif puisant réserves et énergie;
*Baisse continue du nombre d'abeilles dans la ruche.
   En novembre, un climat trop doux entraine une activité inhabituelle de la part des abeilles d'hiver, qui mangent plus de provisions qu'elles n'en ramènent lorsque la colonie est petite, et qui s'épuisent trop tôt. En cela le réchauffement climatique ne facilite pas la tache des apiculteurs car un hiver trop doux fait fondre les provisions, fatigue les abeilles, augmente la ponte de la reine et par voie de conséquence la reproduction du varroa (parasite de la ruche, voir aussi ici), le tout affaiblissant encore davantage la colonie...
La reine et une poignée d'abeilles

  
















   Sur cette photo, nous apercevons la reine entourée de sa cour. On distingue aussi du couvain hélas mort. Du couvain fin novembre, conséquence d'une entrée de pollens tardive à cause d'un automne chaud, peut être mortel pour une petite colonie: il nécessite 35°C pour se développer, beaucoup de nourriture, beaucoup d'activité de la part des ouvrières. Seule une colonie très forte peut se le permettre!
   Malheureusement, ce cas d'école n'est pas rare et peut être observé actuellement dans de nombreuses ruches non seulement en France mais en Europe et plus loin encore. L'effondrement de certaines colonies est souvent inévitable si l'on n'a pas réussi à agir assez tôt. 
   Or, il n'est pas question pour les apiculteurs de se substituer à la nature et quand il tente de le faire ça ne suffit pas tout le temps...
   Si cette nature affaiblie ne fournit plus le gîte et le couvert aux pollinisateurs, l'homme va droit dans le mur!
On commence par ouvrir la ruche

on prépare son matériel

Après avoir repéré où est la reine, on extrait le cadre
































Puis on attrape la reine et quelques accompagnatrices

Les accompagnatrices s'occuperont de la reine



















   Les élèves d'ULIS sont soulagés d'avoir pu sauvé leur reine, dont ils connaissent l'importance dans une colonie. Généralement, lorsqu'il s'agit d'une bonne reine, c'est elle qui disparait en dernier car les abeilles s'occupent d'elle jusqu'au bout.


















   L'étape suivante est délicate en cette période pendant laquelle on ne touche pas aux ruches et à leurs occupantes. mais sauvetage oblige, il a fallut ponctionner des abeilles dans une ruche pour constituer un nouvel essaim. Heureusement, nous avons une colonie extrêmement forte qui ne souffrira pas de cette ponction impromptue!
  Quand nous ouvrons la ruchette, cet essaim nu (sans reine) se sait orphelin, il bourdonne et les abeilles sont agitées. Elles sortent en désordre toutefois limité vu le froid ambiant, et certaines font une grappe sur le devant (photo).










   L'étape finale consiste à ouvrir la cage de la reine afin qu'elle entre d'elle-même dans la ruchette. Pas le temps de la prendre en photo tellement elle est pressée de filer par l'ouverture. Elle disparait dans la masse de l'essaim en moins de 2 secondes!
Les abeilles "heureuses" appellent leurs copines à l'extérieur












   Dés que la reine est entrée, c'est l'excitation général, les ouvrières à la porte lancent des phéromones pour dire à l'extérieur qu'une reine est entrée: elles utilisent pour cela leur glande de Nasanof située en bout d'abdomen.
   Quelques heures plus tard, un nourrissement est mis en place (candi). A l'intérieur c'est toujours une activité intense et il s'en dégage beaucoup de chaleur.
   Quelques jours plus tard, le calme est revenu, la nouvelle colonie de Sagebien s'apprête à passer l'hiver en ruchette jusqu'au printemps.

   Que retenir de tout cela?
   Qu'il est difficile aujourd'hui de maintenir une colonie d'abeilles, car sa survie dépend de plusieurs facteurs sur lesquels l'apiculteur ne peut pas toujours agir. 
   Ainsi, on peut voir grâce à cette expérience qui sera poursuivie en 2015, qu'implanter des abeilles est une démarche importante, mais qu'elle doit s'accompagner d'autres mesures: semer et planter des végétaux mellifères et pollinifères, trouver des alternatives aux traitements insecticides et herbicides, et dans une plus large mesure freiner le réchauffement climatique qui aggrave encore le phénomène.

   L'association Les Ruches De Wailly met à disposition des abeilles, un apiculteur avec son expérience et son savoir-faire, elle sensibilise les élèves à ces problèmes. Souhaitons que cela permettra de sensibiliser aussi les pouvoirs publics.

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